Mardi, 5 mai 2020

Réponse neuchâteloise à la crise : un grand bravo tout azimut

Prise de parole du député Aël Kistler, chef du groupe vert'libéral-PDC au Grand Conseil neuchâtelois. Et à la fin : une interview RTN du président du parti Mauro Moruzzi (et député lui aussi), qui explique pourquoi le Conseil d'État aurait dû fournir un vrai rapport (même succint) au Grand Conseil sur cette situation extraordinaire : un devoir envers le parlement et la population !

Une situation difficilement prévisible, imprévue et dramatique. Ces quelques mots pourraient résumer le contexte difficile dans lequel est plongé le canton de Neuchâtel, au même titre que le monde entier.

 

La maladie frappe sournoisement là où elle trouve une fragilité. Et il est du devoir des autorités de démontrer l'importance qu'a la civilisation à leurs yeux. Selon Margaret Mead, une anthropologue américaine, les premiers signes de civilisation sont représentés par la découverte d'un fémur fracturé puis consolidé. Dans les conditions de vie sauvage, le handicap infligé par une telle blessure signifie en principe un arrêt de mort par exposition aux prédateurs durant de longues semaines. La rémission d'une telle fracture impose une solidarité entre plusieurs individus pour permettre à la personne blessée de bénéficier des conditions et du temps nécessaire pour se remettre sur pied.

 

La pandémie que nous traversons fait sensiblement écho à cette Histoire de la civilisation. En effet, afin de protéger les personnes les plus menacées, nous devons collectivement renoncer à nos libertés, nos habitudes et dans certains cas même à notre gagne-pain.

 

Ces mesures, instaurées rapidement pour limiter la propagation exponentielle du virus, ont su éviter la saturation de notre système hospitalier; évitant par là-même les situations moralement difficile de devoir choisir qui prioriser dans l'attribution des moyens nécessaires à la survie.

 

Notre groupe remercie le Conseil d'Etat ainsi que le personnel des différents services pour leur réactivité et l'investissement colossal que certains ont dû fournir. Nous remercions du fond du coeur le personnel de santé, tant public que privé, qui s'est investi dans cette crise au-delà des espérances légitimes et en collaborant, avec l'armée, la protection civile et le service civil. Toutes ces personnes astreintes à un service envers la communauté, tirant à la même corde, démontre la profonde volonté de se sentir utile en temps de crise. Nous saluons la décision de prendre en charge des patients étrangers; il s'agit là encore d'un acte fort démontrant la foi en la civilisation.

 

La population neuchâteloise, elle aussi, mérite d'être saluée et remerciée. Pour avoir joué le jeu, avoir su se limiter dans ses libertés, s'être mise à disposition bénévolement, pour le bien commun. Les mesures peuvent maintenant être allégées, mais elles ne sont pas totalement levées. Nous savons pouvoir compter encore sur la population, sur nous donc, pour continuer sur cette belle lancée. Ensemble, nous traversons cette crise au mieux.

 

Notre groupe se réjouit que des mesures aient pu voir le jour pour soutenir les indépendants, les milieux culturels et sportifs, les PME. Au même titre que nos aînés et nos malades, ces précieuses institutions peuvent montrer quelques fragilités et méritent d'être soutenues.

 

Enfin, enfin pourrait-on dire, nos institutions peuvent recommencer à fonctionner, presque normalement. A ceci près que nos débats ne peuvent se tenir dans leur fief habituels. Que les informations ne suivent plus, elles non plus, les canaux habituels du Conseil d'Etat vers le Parlement par le biais de rapports. Tout passe par les médias, dont nous saluons aussi au passage le très bon travail dans un contexte difficile.

 

Dans le cadre de la reprise des travaux parlementaire, il nous apparaissait de bon ton de recevoir un rapport, même très succinct, listant a minima les mesures prise par le Conseil d'Etat spécifiquement pour le Canton. En chiffrer les incidences dans la mesure du possible, avec une évidente compréhension du législatif pour les approximations dues aux nombreuses inconnues. Cela aurait eu l'avantage de la clarté, permettant aux groupes politiques ainsi qu'à la population de se faire une image de l'ampleur des mesures prises. D'éclairer certaines zones d'ombre sans avoir à poser des questions pouvant toucher tant de thèmes intriqués. Une liste des mesures aurait probablement apaisé l'esprit des parlementaires. Aussi, notre groupe a déposé un amendement au projet de décret, pour que l'information reprenne, comme le travail parlementaire, un chemin plus proche de ce que notre Constitution préconise. Il s'agit de répondre à la demande légitime du Parlement et de la population, de savoir ce que le Conseil d'Etat a fait de ses prérogatives durant cette situation exceptionnelle. Nos débats devant reprendre de manière "presque" normale d'ici trois semaines, nous attendons que le Grand Conseil soit renseigné de manière officielle par le biais d'un rapport. Cela permettra à la députation de prendre des décisions plus sereines et de faire des propositions solides quant au futur de notre République.

 

Dans les médias :

Article sur Swissinfo avec interview du député Mauro Moruzzi.

Interview de Mauro lors du flash info de RTN du 5 mai 2020 à 18h00.