Mercredi, 29 mai 2019

Parité femme-homme au Grand Conseil : les VL pas convaincu-es du tout par le projet socialiste

Les Vert'libéraux sont fortement engagés, depuis leur naissance, à promouvoir la parité homme-femme dans tous les secteurs de la vie citoyenne, économique ou politique. On en veut pour preuve l’engagement de nos membres et de nos élu-es, que ce soit à Berne ou dans les cantons. A Neuchâtel, on ne prendra que le dernier exemple en date : la décision de présenter des listes 100% paritaires pour les élections au Conseil national, et de ne présenter que des femmes pour le Conseil des Etats. La proposition socialiste de forcer la création de deux élections pour deux listes - une féminine et une masculine - ne nous a pas convaincu-es du tout. Elle aurait même été contre-productive.

Prise de position de Mireille Tissot-Daguette, députée au Grand Conseil

 

Le peuple s’est prononcé favorablement, il y a peu, sur la circonscription unique, pour essayer de réduire les tensions Haut-Bas-Vallées et unifier le canton. Cette nouvelle circonscription n’a même pas encore pu être expérimentée qu’il nous est déjà proposé de créer de nouveaux clivages via des listes électorales étanches. Pour quelle raison ? Selon les auteurs de la démarche, pour réduire les tensions entre les genres et atteindre la parité hommes-femmes au sein du parlement cantonal.

 

Même si l’idée d’atteindre la parité au sein de notre hémicycle peut séduire à première vue, y parvenir en imposant deux listes électorales nous plaît beaucoup moins.

 

En effet, décréter l’égalité via deux listes électorales, avec 50 hommes à choisir sur la première élection et 50 femmes sur la seconde, ne nous paraît pas la bonne solution pour atteindre la parité. Cloisonner les élections par genre nous paraît même contre-productif.

 

Imaginons que ce projet de décret soit adopté. Concrètement, cela voudra dire que l’électrice ou l’électeur devra faire un choix entre des hommes et un choix entre des femmes. Ce qui signifie procéder à deux élections distinctes, en parallèle, au cours desquelles les hommes débattraient exclusivement entre eux et les femmes entre elles, sans aucun mélange des genres... Cette séparation en deux élections ne donnera aucun avantage à la cause féminine et n’améliora en aucun cas l’image de la femme en politique. Au lieu de montrer que les femmes sont tout autant compétentes que les hommes, nous renforcerions les clichés, en séparant la population par sexe pour donner une chance aux femmes, insinuant par là que les femmes, pour être élues, ne peuvent pas se mesurer en concurrence directe avec les hommes. On le voit : le message que véhiculerait une telle scission des listes, même pour une durée limitée à trois législature, serait désastreux.

 

Mais l’idée de « genrer » les listes électorales pourrait aussi poser d’autres problèmes.

 

Ainsi, alors que la société commence à peine à admettre que la différentiation sexuelle ne se réduit pas aux deux catégories d’« homme » ou de « femme », de telles listes pourraient renforcer la marginalisation d’une minorité de nos concitoyen-nes qui ne se reconnaîtraient ni dans la liste « hommes », ni dans la liste « femmes ».

 

De plus, en voulant absolument que notre parlement représente fidèlement notre population et vu que nous parlions de la communauté LGBTQ+, devrions-nous faire des listes suivants l’orientation sexuelle ?

 

Ou suivant d’autres catégories encore : est-ce que toutes les communautés religieuses sont représentées au Grand Conseil ? Si oui, le sont-elles dans les mêmes proportions que dans la population neuchâteloise ? Et ne devrions-nous pas procéder aussi à des élections séparées pour les jeunes et les moins jeunes, pour être sûr-es que toutes les classes d’âge soient représentées de la manière la plus équitable possible ? Je vous pose la question : ces aspirations seraient-elles moins légitimes que celle des femmes à être mieux représentées dans notre hémicycle ? En créant un dangereux précédent, nous mettrions le doigt dans un engrenage sans fin…

 

Et pourtant, j’ose rêver d’un Grand Conseil neuchâtelois où la question de la parité ne sera plus à l’ordre du jour, car celle-ci sortira directement des urnes. Mais, pour nous, le groupe Vert’libéral-PDC, la fin ne justifie pas les moyens et ce n’est pas en imposant une parité artificielle que nous arriverons à un équilibre serein. Il faudra sans doute continuer à se battre pour faire changer les mentalités, en commençant par renforcer la visibilité des femmes élues.

 

Car oui, une responsabilité importante en incombe à chaque parti, qui doit faire tout ce qu’il peut pour augmenter le nombre de candidates sur ses listes, et leur donner la place qu’elles méritent sur la place publique. Convaincre une femme à se présenter n’est pas toujours facile et j’encourage tous les partis à proposer des listes proches de la parité et de soutenir leurs élues femmes. C’est par l’exemple et par un travail patient que le combat pourra être gagné.

 

Mais de grâce, que les électrices et les électeurs puissent faire leur choix en fonction des profils et des qualités des candidates et des candidats, et pas en limitant leur choix en fonction du sexe.